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Criet/Affaire navire échoué à Fidjrossè: voici en détail les explications des militaires et policiers face au contrebandier. 

L’affaire du navire échoué sur les côtes de Fidjrossè à Cotonou continue de captiver l’attention publique, avec les derniers développements survenus lors de l’audience du 28 novembre 2024.

Les membres de l’équipage ainsi que les fonctionnaires de l’armée et de la police impliqués ont été confrontés aux accusations portées contre eux devant le tribunal correctionnel de la CRIET. Cette audience a marqué une étape importante  dans le dossier avec les témoignages des quatre citoyens béninois impliqués. Les détails de l’affaire révèlent que 18 individus sont impliqués, y compris les 14 membres de l’équipage du navire, 03 officiers de l’armée et de la police ainsi qu’un contrebandier de produits pétroliers.

 Les accusations portées contre les fonctionnaires de l’État comprennent des allégations d’abus de fonction, tandis que les membres de l’équipage font face à des accusations de navigation sans les titres requis et de violation des règles maritimes. Le contrebandier, quant à lui, est accusé de trafic illicite de produits pétroliers. Ces individus ont été interpellés suite à l’incident du navire SPSL, qui s’est échoué le 30 juin 2024. L’issue de cette affaire pourrait avoir des implications significatives pour la réglementation maritime et la lutte contre la contrebande dans la région.

Dans le cadre d’une audience judiciaire tenue le jeudi dernier, un événement inhabituel a été minutieusement examiné : l’échouage d’un navire sur les côtes de Fidjrossè. Quatre citoyens béninois, confrontés à des accusations graves, ont présenté leur version des faits. Parmi eux, un homme d’affaires en produits pétroliers, qui jouait également le rôle d’informateur pour les autorités maritimes et la police fluviale, a été appelé à témoigner. Cet individu, qui se décrivait comme un fournisseur de provisions pour les navires naviguant au large des eaux béninoises, a révélé avoir été sollicité par le capitaine du navire échoué pour une livraison de provisions d’une valeur de 6 millions de FCFA.

Selon son témoignage, en échange de ses services et du règlement d’une dette, il devait recevoir 20 tonnes de gasoil du capitaine. La procédure de transbordement, qui consiste à transférer le carburant du navire vers de petites embarcations, est une opération délicate encadrée par des réglementations strictes au Bénin, notamment pour prévenir le détournement du navire.

Alors qu’il entreprenait les démarches pour obtenir les autorisations nécessaires, une panne imprévue du navire est survenue. L’homme a également été chargé de l’acquisition des pièces nécessaires à la réparation du navire. Cependant, avant qu’il ne puisse intervenir, le radar de la préfecture maritime avait déjà détecté la présence du navire à une distance de 10 nautiques (environ 20 km) des côtes de Grand-Popo, quelques jours seulement avant que le navire ne s’échoue. Une alerte avait été émise, mobilisant les équipes de la base navale de Cotonou et de la police fluviale mais le destin du navire était déjà scellé.

Selon les informations fournies par l’accusation, c’est au cours de cette période critique qu’un collaborateur, agissant en tant qu’informateur, a fait surface pour initier les procédures d’autorisation nécessaires. Cependant, pendant que ces démarches administratives étaient en cours, une équipe mixte composée de membres de la marine et de la police fluviale a pris l’initiative d’aborder l’équipage d’un navire suspect.

Leur objectif premier était de confronter le capitaine du bateau, suspecté d’avoir violé les eaux territoriales béninoises. À leur grande surprise, le capitaine n’était pas présent sur le navire, une absence qui a compliqué la situation. En raison d’une défaillance technique non spécifiée, le remplaçant du capitaine s’est retrouvé incapable de maintenir le navire en position de mouillage. Cette incapacité a été exacerbée par des conditions maritimes difficiles, avec une marée particulièrement agitée qui a aggravé la situation.

Dans une tournure inattendue du procès de contrebande pétrolière, l’accusé a révélé que c’était la première fois qu’il envisageait d’être rémunéré en produits pétroliers plutôt qu’en espèces. Il a affirmé son ignorance des lois régissant cette forme de paiement, ce qui l’a poussé à solliciter l’assistance des autorités compétentes. Il a déclaré avoir approché plusieurs hauts responsables, dont le commandant de la base navale de Cotonou, le commandant de la police fluviale et le responsable de la communication de la préfecture maritime, pour obtenir des conseils sur la manière de procéder légalement. Selon ses dires, ces autorités lui auraient conseillé de faire appel à une agence maritime qualifiée pour gérer la transaction dans le respect de la législation béninoise. Cette déclaration soulève des questions sur la clarté de la réglementation et la facilité d’accès aux informations légales pour les individus impliqués dans le commerce maritime.

Selon les rapports, un individu aurait tenté d’engager des négociations avec des membres de la marine pour obtenir de l’aide dans des opérations maritimes douteuses. Il aurait prétendu avoir remis une somme conséquente au commandant de la base navale de Cotonou pour faciliter ses desseins. Cependant, lors de son audience devant le tribunal, le colonel a nié avoir reçu de l’argent, tout en confirmant avoir été contacté par l’individu en question.

Le commandant, en pleine préparation d’un événement naval, a reçu des appels insistants de la part de l’indicateur. Malgré les interruptions, il a pris le temps de rappeler l’individu, lui conseillant de s’adresser à une agence maritime compétente pour résoudre ses problèmes de navire. Le colonel a souligné l’importance de la réglementation des services de transbordement, essentiels pour protéger les navires contre les attaques de pirates. Il a clarifié que tout navire se trouvant à une distance de 12 nautiques des côtes béninoises doit obtenir une autorisation pour y opérer, soulignant la nécessité d’informer les trois entités maritimes principales du pays de toute présence navale.

Dans une tournure d’événements récente, l’attention s’est portée sur les commandants des bases navale et fluviale de Cotonou, tous deux appelés à témoigner. Le dernier en date, le commandant de la base fluviale et maritime, a été entendu au tribunal où il a admis avoir été contacté par un intermédiaire. Ce dernier lui aurait demandé de déployer ses troupes pour assurer la sécurité du navire SPSL. Cependant, le commandant a interrogé l’intermédiaire sur l’accomplissement des formalités administratives préalables, une procédure standard pour de telles opérations. L’interlocuteur a prétendu que les démarches étaient en cours, supervisées par un individu nommé Marcos. Le commandant a insisté sur la nécessité de recevoir une quittance officielle avant d’engager ses hommes dans une telle mission. Il a également conseillé que le navire retourne au port de Cotonou afin de régulariser la situation. Cette affaire met en lumière la rigueur des commandants dans le suivi des protocoles légaux et leur engagement envers la sécurité et l’ordre public. Elle souligne également l’importance de la transparence et du respect des procédures dans les opérations maritimes, des principes fondamentaux pour prévenir toute irrégularité et maintenir la confiance dans les institutions chargées de la sécurité maritime.

L’officier responsable a souligné que, malgré les tentatives, la sécurité de l’équipage et la nécessité de respecter les procédures légales ont primé, conduisant au retour du capitaine et de huit membres d’équipage sur la terre ferme pour initier les démarches judiciaires appropriées. Cette action fait écho à un incident similaire survenu en avril 2024, où les propriétaires d’un navire ayant enfreint la souveraineté maritime du Bénin ont été sanctionnés d’une amende de cinq millions de FCFA.

Parallèlement, le chef du service d’information et de communication de la préfecture maritime a réfuté les allégations d’abus de pouvoir, notamment concernant les interactions et les déclarations faites par un informateur. Confirmant le contact avec l’informateur, qui a même effectué une visite dans son bureau, le responsable a insisté sur le fait que les tarifs de transbordement appliqués étaient conformes à la réglementation en vigueur. Il a précisé que le coût journalier pour un transbordement s’élève à 650 000 FCFA, auxquels s’ajoutent les frais de sécurité de 150 000 FCFA et les droits de douane. Face à la demande de l’intermédiaire de réaliser l’opération sur cinq jours, un devis approximatif de cinq millions de FCFA lui a été présenté.

Les accusations portées par la Cour suggèrent que des négociations sur les tarifs auraient eu lieu entre les deux parties dans le but de parvenir à un accord. Cependant, le marin a vigoureusement nié ces affirmations, assurant qu’aucun arrangement financier n’avait été discuté ou conclu. Devant les juges, il a affirmé avoir uniquement tenté de clarifier la réglementation à l’intermédiaire, qui n’était pas familier avec les procédures, et a catégoriquement démenti avoir reçu de l’argent de sa part, maintenant son intégrité et son respect des protocoles établis.

Les fonctionnaires, appelés à témoigner, ont été confrontés à une question cruciale : avaient-ils accepté des pots-de-vin lors des négociations controversées avec un collaborateur non divulgué ? Face à la gravité des implications, chaque officier a répondu avec fermeté, « Négatif », une déclaration unanime qui a résonné dans le tribunal. Cette séance, marquée par quatre dépositions consécutives, s’est étendue sur plus de trois heures, un marathon judiciaire qui a mis à l’épreuve la patience et l’attention de tous les présents. Finalement, le président de la Cour, après avoir soigneusement écouté les témoignages, a décidé de reporter la suite des procédures au 12 décembre 2024, laissant ainsi le temps à la défense de préparer ses contre-arguments. Lors de cette prochaine session, l’attention se tournera vers le capitaine et son équipage, dont les témoignages sont très attendus et pourraient s’avérer déterminants dans le dénouement de cette affaire complexe.

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